Ce mec est insupportable, invivable. Une teigne, malsaine et agressive…
Quand j’ai rencontré Magalie, nous sortions toutes les deux d’un « test » pour intégrer une association.
Nous étions dépitées, après avoir été littéralement essorées par un groupe indécis et méprisant qui nous avait fait passer des tests de sélection proprement a-huri-ssants (oui oui, des tests de sélection pour intégrer une asso, vous ne rêvez pas !).
Nous étions toutes les deux bien décidées à intégrer une asso, dans cette grande ville froide et étrange, malgré cette première expérience malheureuse.
C’est ainsi que nous devînmes copines. Je la déposais au métro, nous échangeâmes nos numéros, et de fil en aiguille, des tuyaux sur les troupes existantes.

Quand le copain de ta pote est un pervers narcissique…
Je la trouvais vaguement réservée, craintive, très peu assurée, mais très gentille et intéressante.
Quelques mois plus tard, je la croisais à un festival. J’étais seule et elle me proposait de me joindre à elle et son groupe de copains. Je remarquais très vite l’un de ses copains, fort en gueule, coupant la parole à tout le monde, contredisant sans cesse les uns ou les autres. Drôle de type, me disais-je.
Magalie était assez en retrait et n’osait pas dire grand-chose. Gagnée par son attitude discrète et craintive, je ne pipais mot. Grand bien m’en fasse !
Un jour, elle m’invita à un apéro, chez elle et son copain. Tiens, elle avait un copain, elle ? Je la croyais célibataire.
Je me rendis donc à cette soirée, ravie, moi qui peinais à rencontrer du monde dans cette grande ville anonyme. Quelle ne fut ma surprise quand je découvris que son copain…c’était le drôle de type que j’avais croisé au festival.
Holy Cow ! Mamma Mia.

C’était luiiii son copaiiiiin ?
Ce type, qui, là, à présent, descendait en flamme ce film, dont je venais de parler, et dont je disais qu’il était génial ? Magalie se taisait. Elle avait l’air mal à l’aise.
Pendant toute la soirée, il démonta chaque opinion ou avis que j’émettais sur quelque chose, me proposait un verre et critiquait sévèrement mon choix. Je les quittais, un peu choquée. Mais c’est quoi ce type ??? Me demandais-je.
Dans les mois qui suivirent, Magalie m’invitait, parfois, à des soirées. Je disais oui quand je savais que son infect compagnon ne serait pas là, ce qui était très rare.
On fait une soirée Filles ???
Après une période assez déprimante, tant personnelle que professionnelle, je me décidais à reprendre ma vie sociale en main, et j’invitais Magalie chez moi, mais hors-de-question de supporter son mec. Alors je lui précisais que j’organisais une soirée Filles.
Magalie était fine, et trouvait ça louche. D’autant plus que, dans cette grande ville étrange, la jeune trentenaire que j’étais ne parvins à recruter, pour cette soirée, aucune des autres copines que j’avais contactées.
Je l’annulais…, frustrée. Par la suite, je refusais ses invitations ou annulais au dernier moment. Je déprimais, sur cette vie sociale morne et compliquée, où tous les gens sympas que je rencontrais étaient indisponibles, 80% du temps.
C’est ça, ô petite trentenaire, que d’avoir refusé le mariage et la maternité ! Tu espérais continuer à sortir avec des potes ? Détrompe-toi ! Ton chemin se fera désormais en solitaire et personne ou presque ne pensera à toi. Ma vie, c’était à peu près devenu cela.
Un jour, Magalie se fâcha contre moi :
– « as-tu un problème avec moi ? », me dit-elle, au téléphone.
– « Mais non ! », m’écriais-je. « J’étais déprimée, ces derniers mois, c’est tout ».
Elle n’était pas née de la dernière pluie. Je pense qu’elle se doutait des raisons de mon silence.
Supporter le pervers narcissique car on est peaceful…
Elle m’invita, peu de temps après, à une soirée chez elle. Là, je rencontrais d’autres filles, fort sympathiques.
Son homme, seul représentant mâle de la soirée, fut tout aussi antipathique que les deux premières fois. Personne ne s’en formalisait.
J’avais une monstrueuse envie de le pulvériser !

Je pris sur moi, et fis venir Magalie, à mon tour, à des soirées, des après-midi jeux chez moi. Son copain suivit.
Les deux fois où il vint chez moi, mes amis s’indignèrent ensuite de son comportement. Il parlait très fort, couvrant nos voix, critiquant le choix de nourriture et boissons, mes livres, nos opinions…

Sidération face à l’épouvantable connard
Qu’est-ce qui me retint de lui envoyer mon poing dans la gueule, ce jour-là ? Je ne sais pas.
Vous savez, face à ce genre d’individus, on ressent toujours un curieux effet de sidération, surtout quand les autres, autour, font comme si de rien n’était.
Les fois suivantes, je me montrais très froide avec lui. Mais que fait elle avec ce con ??? Me demandais-je.
Et d’ailleurs, d’où et comment, et pourquoi la traitait-il si mal par moment ? Et pourquoi se laissait-elle faire ???
Je tentais d’en parler à une copine commune. Elle rit bêtement et se tut.

Ma vie sociale reprenait du poil de la bête. On se voyait beaucoup avec Magalie, sans son copain.
Comme je n’avais jamais rien osé dire, je me sentais contrainte de me taire.
Elle me fit rencontrer d’autres personnes et je me sentais d’autant moins capable de lui expliquer que son mec, je ne le supportais pas. Engrenage.
Un soir, un type éméché, à une soirée, s’amusa à provoquer Éric, le copain de Magalie : « Éric, il est vraiment complètement égocentré, ah ah ah ; hein Éric…tu prends bien les autres pour des cons ? Oh oh oh ».
Il ponctuait ses phrases d’un rire gras de soûlard.
Je riais sous cape. Enfin quelqu’un osait dire à ce gros con d’Éric ses quatre vérités. Éric ne répondait pas et je le comprends : il était plus petit, pas de taille à mettre l’autre à terre. Et même s’il l’avait été… à part critiquer les autres, que savait-il exactement faire ?
Après cet épisode, je me débrouillais de nouveau pour voir Magalie sans Éric, ce qui était très rare.
Un soir, après plusieurs verres ensemble, elle me glissa, hésitante : « Tu sais, Éric, il y a beaucoup de gens qui le prennent pour un con, mais en vrai, on peut lui dire les choses… ».
– « Hum », répondis-je, prise au dépourvu et pas du tout convaincue, « oui, je vois bien qu’on peut lui dire les choses… ».
Intérieurement, je me disais :
« P…., mais p….., JE LE HAIS TON MEC ! C’est une meeeeerd-euhh ! Les quelques idiot.e.s qui te disent qu’il est cool, normal sont des abruti.e.s ou des lâches. En fait, si ce n’était pas si dur de se faire des potes, dans cette ville, ça ferait longtemps que toi et moi on ne se verrait plus, et comme ça, je ne verrais plus sa gueule de pauvre tordu à lui !!!! ».
Les mois passèrent, parsemés de quelques soirées, ici et là, avec la petite bande de copains qui se formait. Éric était parfois « potable », mais c’était rare. Tout le monde faisait comme si de rien n’était. Nous fûmes confinés, puis déconfinés…
Quand le pervers fait déborder le vase…
J’allais de mieux en mieux et m’habituais à cette grande ville, à ce nouveau mode de vie un peu pourri, assez déprimant où l’on voit peu d’amis, parce-qu’on-a-plus-de-30-ans. Je me rendais à des événements type OVS, je rencontrais plus de monde.
Je n’avais pas reformé, à proprement parler, un cercle d’amis solide, mais je ne me sentais plus seule, et ça, c’était très important.
J’organisais mon anniversaire et nous nous retrouvâmes en petit petit comité. Et pour mon plus grand déplaisir, Éric était là.
Il gâcha une partie de ma soirée, critiquant, rabaissant, se vantant de ceci, cela, nous expliquant par le menu détail des recettes de cuisine dont nous n’avions rien à foutre.
Et soudain, il s’endormit, miraculeusement, comme une merde, à 23h, sur mon canapé.
Je me félicitais d’avoir versé du GHB dans son verre.

Non, je plaisante…
Ce jour-là, je décidais que c’était ter-mi-né ! Fini. Over. Ce type ne viendrait plus chez moi !
Peu de temps après, je buvais un soir, un verre, avec les garçons de mon asso, après un spectacle. La conversation dériva sur les couples, l’amour…
Soudain, l’un d’entre eux cita Magalie, et le copain de Magalie…
Ils étaient quelques-uns à l’avoir rencontré. Fusèrent les mots « pervers narcissique », « tordu », « agressif », « impoli »…
Je livrais moi aussi mes impressions. Là où je voyais, dans son couple, malgré les outrances de son homme, un relatif équilibre entre eux, mes collègues masculins prétendirent s’inquiéter pour elle. Carrément !?!
Son mec est un perv et tout le monde fait comme si de rien n’était
Ca me rendait folle de rage de devoir supporter ce connnn d’Eric aux rares occasions où je ne pouvais pas l’éviter.
Ca me rendait dingue que quelques copains encensent ce mec, disent du bien de ce mec, alors qu’il se montrait hautain, infect et qu’on savait bien qu’il manquait de respect à Magalie. J’ai vu des copains se poiler sur certains comportements malsains de ce type avec sa copine. C’était ahurissant ! Si je faisais la moindre allusion au comportement réel du gredin, je ne récoltais que des silences gênés.
Par ailleurs, l’ambiance, dans notre asso, devenait de plus en plus désagréable et Magalie de plus en plus chiante avec moi. Elle se plaignait de son travail, elle faisait des commérages sur les gens de notre asso… s’attribuait mes paroles ou mes idées. Grrrr…. Reste à ta place, connasse !
Elle devenait…possessive, jalouse avec moi. Quand nous croisions des connaissances communes, elle leur parlait de « Nos activités » à elle et moi, comme si nous étions des sœurs siamoises. Beuuuurk.
Alors je coupais les ponts, … c’est aussi simple que ça.
Et je n’eus pas de regret, non, pas de regret à ne pas avoir joué les lanceuses d’alerte, les sauveuses avec Magalie. Pourquoi aurais-je dû me taper le sale boulot ?